basilique saint pierre vatican de nuitSous licence creative common Maria Eklind
BULLE D'INDICTION
DU JUBILÉ EXTRAORDINAIRE
DE LA MISÉRICORDE
FRANÇOIS
EVÊQUE DE ROME
SERVITEUR DES SERVITEURS DE DIEU
À CEUX QUI LIRONT CETTE LETTRE
GRÂCE, MISÉRICORDE ET PAIX
1. Jésus-Christ est le visage de la miséricorde du Père. Le mystère de la
foi chrétienne est là tout entier. Devenue vivante et visible, elle
atteint son sommet en Jésus de Nazareth. Le Père, « riche en miséricorde »
(Ep 2, 4) après avoir révélé son nom à Moïse comme « Dieu tendre et
miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité » (Ex 34, 6)
n’a pas cessé de faire connaître sa nature divine de différentes manières
et en de nombreux moments. Lorsqu’est venue la « plénitude des temps » (Ga
4, 4), quand tout fut disposé selon son dessein de salut, il envoya son
Fils né de la Vierge Marie pour nous révéler de façon définitive son
amour. Qui le voit a vu le Père (cf. Jn 14, 9). A travers sa parole, ses
gestes, et toute sa personne,[1] Jésus de Nazareth révèle la miséricorde
de Dieu.
2. Nous avons toujours besoin de contempler le mystère de la miséricorde.
Elle est source de joie, de sérénité et de paix. Elle est la condition de
notre salut. Miséricorde est le mot qui révèle le mystère de la Sainte
Trinité. La miséricorde, c’est l’acte ultime et suprême par lequel Dieu
vient à notre rencontre. La miséricorde, c’est la loi fondamentale qui
habite le cœur de chacun lorsqu’il jette un regard sincère sur le frère
qu’il rencontre sur le chemin de la vie. La miséricorde, c’est le chemin
qui unit Dieu et l’homme, pour qu’il ouvre son cœur à l’espérance d’être
aimé pour toujours malgré les limites de notre péché.
3. Il y a des moments où nous sommes appelés de façon encore plus
pressante, à fixer notre regard sur la miséricorde, afin de devenir nous
aussi signe efficace de l’agir du Père. C’est la raison pour laquelle j’ai
voulu ce Jubilé Extraordinaire de la Miséricorde, comme un temps favorable
pour l’Eglise, afin que le témoignage rendu par les croyants soit plus
fort et plus efficace.
L’Année Sainte s’ouvrira le 8 décembre 2015, solennité de l’Immaculée
Conception. Cette fête liturgique montre comment Dieu agit dès le
commencement de notre histoire. Après qu’Adam et Eve eurent péché, Dieu
n’a pas voulu que l’humanité demeure seule et en proie au mal. C’est
pourquoi Marie a été pensée et voulue sainte et immaculée dans l’amour
(cf. Ep 1, 4), pour qu’elle devienne la Mère du Rédempteur de l’homme.
Face à la gravité du péché, Dieu répond par la plénitude du pardon. La
miséricorde sera toujours plus grande que le péché, et nul ne peut imposer
une limite à l’amour de Dieu qui pardonne. En cette fête de l’Immaculée
Conception, j’aurai la joie d’ouvrir la Porte Sainte. En cette occasion,
ce sera une Porte de la Miséricorde, où quiconque entrera pourra faire
l’expérience de l’amour de Dieu qui console, pardonne, et donne
l’espérance.
Le dimanche suivant, troisième de l’Avent, la Porte Sainte sera ouverte
dans la cathédrale de Rome, la Basilique Saint Jean de Latran. Ensuite
seront ouvertes les Portes Saintes dans les autres Basiliques papales. Ce
même dimanche, je désire que dans chaque Eglise particulière, dans la
cathédrale qui est l’Eglise-mère pour tous les fidèles, ou bien dans la
co-cathédrale ou dans une église d’importance particulière, une Porte de
la Miséricorde soit également ouverte pendant toute l’Année Sainte. Au
choix de l’Ordinaire du lieu, elle pourra aussi être ouverte dans les
Sanctuaires où affluent tant de pèlerins qui, dans ces lieux ont le cœur
touché par la grâce et trouvent le chemin de la conversion. Chaque Eglise
particulière est donc directement invitée à vivre cette Année Sainte comme
un moment extraordinaire de grâce et de renouveau spirituel. Donc, le
Jubilé sera célébré à Rome, de même que dans les Eglises particulières,
comme signe visible de la communion de toute l’Eglise.
4. J’ai choisi la date du 8 décembre pour la signification qu’elle revêt
dans l’histoire récente de l’Eglise. Ainsi, j’ouvrirai la Porte Sainte
pour le cinquantième anniversaire de la conclusion du Concile œcuménique
Vatican II. L’Eglise ressent le besoin de garder vivant cet événement.
C’est pour elle que commençait alors une nouvelle étape de son histoire.
Les Pères du Concile avaient perçu vivement, tel un souffle de l’Esprit,
qu’il fallait parler de Dieu aux hommes de leur temps de façon plus
compréhensible. Les murailles qui avaient trop longtemps enfermé l’Eglise
comme dans une citadelle ayant été abattues, le temps était venu
d’annoncer l’Evangile de façon renouvelée. Etape nouvelle pour
l’évangélisation de toujours. Engagement nouveau de tous les chrétiens à
témoigner avec plus d’enthousiasme et de conviction de leur foi. L’Eglise
se sentait responsable d’être dans le monde le signe vivant de l’amour du
Père.
Les paroles riches de sens que saint Jean XXIII a prononçées à l’ouverture
du Concile pour montrer le chemin à parcourir reviennent en mémoire:
« Aujourd’hui, l’Épouse du Christ, l’Église, préfère recourir au remède de
la miséricorde plutôt que de brandir les armes de la sévérité … L’Eglise
catholique, en brandissant le flambeau de la vérité religieuse, veut se
montrer la mère très aimante de tous, bienveillante, patiente, pleine
d’indulgence et de bonté à l’égard de ses fils séparés ».[2] Dans la même
perspective, lors de la conclusion du Concile, le bienheureux Paul VI
s’exprimait ainsi : « Nous voulons plutôt souligner que la règle de notre
Concile a été avant tout la charité … La vieille histoire du bon
Samaritain a été le modèle et la règle de la spiritualité du Concile…. Un
courant d’affection et d’admiration a débordé du Concile sur le monde
humain moderne. Des erreurs ont été dénoncées. Oui, parce que c’est
l’exigence de la charité comme de la vérité mais, à l’adresse des
personnes, il n’y eut que rappel, respect et amour. Au lieu de diagnostics
déprimants, des remèdes encourageants ; au lieu de présages funestes, des
messages de confiance sont partis du Concile vers le monde contemporain :
ses valeurs ont été non seulement respectées, mais honorées ; ses efforts
soutenus, ses aspirations purifiées et bénies… toute cette richesse
doctrinale ne vise qu’à une chose : servir l’homme. Il s’agit, bien
entendu, de tout homme, quels que soient sa condition, sa misère et ses
besoins ».[3]
Animé par des sentiments de gratitude pour tout ce que l’Eglise a reçu, et
conscient de la responsabilité qui est la nôtre, nous passerons la Porte
Sainte sûrs d’être accompagnés par la force du Seigneur Ressuscité qui
continue de soutenir notre pèlerinage. Que l’Esprit Saint qui guide les
pas des croyants pour coopérer à l’oeuvre du salut apporté par le Christ,
conduise et soutienne le Peuple de Dieu pour l’aider à contempler le
visage de la miséricorde.[4]
5. C’est le 20 novembre 2016, en la solennité liturgique du Christ, Roi de
l’Univers, que sera conclue l’Année jubilaire. En refermant la Porte
Sainte ce jour-là, nous serons animés de sentiments de gratitude et
d’action de grâce envers la Sainte Trinité qui nous aura donné de vivre ce
temps extraordinaire de grâce. Nous confierons la vie de l’Eglise,
l’humanité entière et tout le cosmos à la Seigneurie du Christ, pour qu’il
répande sa miséricorde telle la rosée du matin, pour une histoire féconde
à construire moyennant l’engagement de tous au service de notre proche
avenir. Combien je désire que les années à venir soient comme imprégnées
de miséricorde pour aller à la rencontre de chacun en lui offrant la bonté
et la tendresse de Dieu! Qu’à tous, croyants ou loin de la foi, puisse
parvenir le baume de la miséricorde comme signe du Règne de Dieu déjà
présent au milieu de nous.
6. « La miséricorde est le propre de Dieu dont la toute-puissance consiste
justement à faire miséricorde ».[5] Ces paroles de saint Thomas d’Aquin
montrent que la miséricorde n’est pas un signe de faiblesse, mais bien
l’expression de la toute-puissance de Dieu. C’est pourquoi une des plus
antiques collectes de la liturgie nous fait prier ainsi : « Dieu qui donne
la preuve suprême de ta puissance lorsque tu patientes et prends
pitié ».[6] Dieu sera toujours dans l’histoire de l’humanité comme celui
qui est présent, proche, prévenant, saint et miséricordieux.
“Patient et miséricordieux”, tel est le binôme qui parcourt l’Ancien
Testament pour exprimer la nature de Dieu. Sa miséricorde se manifeste
concrètement à l’intérieur de tant d’événements de l’histoire du salut où
sa bonté prend le pas sur la punition ou la destruction. D’une façon
particulière, les Psaumes font apparaître cette grandeur de l’agir divin :
« Car il pardonne toutes tes offenses et te guérit de toute maladie ; il
réclame ta vie à la tombe et te couronne d’amour et de tendresse » (Ps
102, 3-4). D’une façon encore plus explicite, un autre Psaume énonce les
signes concrets de la miséricorde : « Il fait justice aux opprimés ; aux
affamés, il donne le pain ; le Seigneur délie les enchaînés. Le Seigneur
ouvre les yeux des aveugles, le Seigneur redresse les accablés, le
Seigneur aime les justes, le Seigneur protège l’étranger. Il soutient la
veuve et l’orphelin, il égare les pas du méchant » (145, 7-9). Voici enfin
une autre expression du psalmiste : « [Le Seigneur] guérit les cœurs
brisés et soigne leurs blessures… Le Seigneur élève les humbles et
rabaisse jusqu’à terre les impies » (146, 3.6). En bref, la miséricorde de
Dieu n’est pas une idée abstraite, mais une réalité concrète à travers
laquelle Il révèle son amour comme celui d’un père et d’une mère qui se
laissent émouvoir au plus profond d’eux mêmes par leur fils. Il est juste
de parler d’un amour « viscéral ». Il vient du coeur comme un sentiment
profond, naturel, fait de tendresse et de compassion, d’indulgence et de
pardon.
7. « Eternel est son amour » : c’est le refrain qui revient à chaque
verset du Psaume 135 dans le récit de l’histoire de la révélation de Dieu.
En raison de la miséricorde, tous les événements de l’Ancien Testament
sont riches d’une grande valeur salvifique. La miséricorde fait de
l’histoire de Dieu avec Israël une histoire du salut. Répéter sans cesse :
« Eternel est son amour » comme fait le Psaume, semble vouloir briser le
cercle de l’espace et du temps pour tout inscrire dans le mystère éternel
de l’amour. C’est comme si l’on voulait dire que non seulement dans
l’histoire, mais aussi dans l’éternité, l’homme sera toujours sous le
regard miséricordieux du Père. Ce n’est pas par hasard que le peuple
d’Israël a voulu intégrer ce Psaume, le “grand hallel” comme on l’appelle,
dans les fêtes liturgiques les plus importantes.
Avant la Passion, Jésus a prié avec ce Psaume de la miséricorde. C’est ce
qu’atteste l’évangéliste Matthieu quand il dit qu’« après avoir chanté les
Psaumes » (26, 30), Jésus et ses disciples sortirent en direction du Mont
des Oliviers. Lorsqu’il instituait l’Eucharistie, mémorial pour toujours
de sa Pâque, il établissait symboliquement cet acte suprême de la
Révélation dans la lumière de la miséricorde. Sur ce même horizon de la
miséricorde, Jésus vivait sa passion et sa mort, conscient du grand
mystère d’amour qui s’accomplissait sur la croix. Savoir que Jésus
lui-même a prié avec ce Psaume le rend encore plus important pour nous
chrétiens, et nous appelle à en faire le refrain de notre prière
quotidienne de louange : « Eternel est son amour ».
8. Le regard fixé sur Jésus et son visage miséricordieux, nous pouvons
accueillir l’amour de la Sainte Trinité. La mission que Jésus a reçue du
Père a été de révéler le mystère de l’amour divin dans sa plénitude.
L’évangéliste Jean affirme pour la première et unique fois dans toute
l’Ecriture : « Dieu est amour » (1 Jn 4, 8.16). Cet amour est désormais
rendu visible et tangible dans toute la vie de Jésus. Sa personne n’est
rien d’autre qu’amour, un amour qui se donne gratuitement. Les relations
avec les personnes qui s’approchent de lui ont quelque chose d’unique et
de singulier. Les signes qu’il accomplit, surtout envers les pécheurs, les
pauvres, les exclus, les malades et les souffrants, sont marqués par la
miséricorde. Tout en Lui parle de miséricorde. Rien en Lui ne manque de
compassion.
Face à la multitude qui le suivait, Jésus, voyant qu’ils étaient fatigués
et épuisés, égarés et sans berger, éprouva au plus profond de son coeur,
une grande compassion pour eux (cf. Mt 9, 36). En raison de cet amour de
compassion, il guérit les malades qu’on lui présentait (cf. Mt 14, 14), et
il rassasia une grande foule avec peu de pains et de poissons (cf. Mt 15,
37). Ce qui animait Jésus en toute circonstance n’était rien d’autre que
la miséricorde avec laquelle il lisait dans le coeur de ses interlocuteurs
et répondait à leurs besoins les plus profonds. Lorsqu’il rencontra la
veuve de Naïm qui emmenait son fils unique au tombeau, il éprouva une
profonde compassion pour la douleur immense de cette mère en pleurs, et il
lui redonna son fils, le ressuscitant de la mort (cf. Lc 7, 15). Après
avoir libéré le possédé de Gerasa, il lui donna cette mission : « Annonce
tout ce que le Seigneur a fait pour toi dans sa miséricorde » (Mc 5, 19).
L’appel de Matthieu est lui aussi inscrit sur l’horizon de la miséricorde.
Passant devant le comptoir des impôts, Jésus regarda Matthieu dans les
yeux. C’était un regard riche de miséricorde qui pardonnait les péchés de
cet homme, et surmontant les résistances des autres disciples, il le
choisit, lui, le pécheur et le publicain, pour devenir l’un des Douze.
Commentant cette scène de l’Evangile, Saint Bède le Vénérable a écrit que
Jésus regarda Matthieu avec un amour miséricordieux, et le choisit :
miserando atque eligendo.[7] Cette expression m’a toujours fait impression
au point d’en faire ma devise.
9. Dans les paraboles de la miséricorde, Jésus révèle la nature de Dieu
comme celle d’un Père qui ne s’avoue jamais vaincu jusqu’à ce qu’il ait
absous le péché et vaincu le refus, par la compassion et la miséricorde.
Nous connaissons ces paraboles, trois en particulier : celle de la brebis
égarée, celle de la pièce de monnaie perdue, et celle du père et des deux
fils (cf. Lc 15, 1-32). Dans ces paraboles, Dieu est toujours présenté
comme rempli de joie, surtout quand il pardonne. Nous y trouvons le noyau
de l’Evangile et de notre foi, car la miséricorde y est présentée comme la
force victorieuse de tout, qui remplit le coeur d’amour, et qui console en
pardonnant.
Dans une autre parabole, nous recevons un enseignement pour notre manière
de vivre en chrétiens. Interpellé par la question de Pierre lui demandant
combien de fois il fallait pardonner, Jésus répondit : « Je ne te dis pas
jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante dix fois sept fois » (Mt 18, 22).
Il raconte ensuite la parabole du « débiteur sans pitié ». Appelé par son
maître à rendre une somme importante, il le supplie à genoux et le maître
lui remet sa dette. Tout de suite après, il rencontre un autre serviteur
qui lui devait quelques centimes. Celui-ci le supplia à genoux d’avoir
pitié, mais il refusa et le fit emprisonner. Ayant appris la chose, le
maître se mit en colère et rappela le serviteur pour lui dire : « Ne
devais-tu pas, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon, comme moi-même
j’avais eu pitié de toi ? » (Mt 18, 33). Et Jésus conclut : « C’est ainsi
que mon Père du ciel vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à
son frère du fond du cœur » (Mt 18, 35).
La parabole est d’un grand enseignement pour chacun de nous. Jésus affirme
que la miséricorde n’est pas seulement l’agir du Père, mais elle devient
le critère pour comprendre qui sont ses véritables enfants. En résumé,
nous sommes invités à vivre de miséricorde parce qu’il nous a d’abord été
fait miséricorde. Le pardon des offenses devient l’expression la plus
manifeste de l’amour miséricordieux, et pour nous chrétiens, c’est un
impératif auquel nous ne pouvons pas nous soustraire. Bien souvent, il
nous semble difficile de pardonner ! Cependant, le pardon est le moyen
déposé dans nos mains fragiles pour atteindre la paix du coeur. Se défaire
de la rancoeur, de la colère, de la violence et de la vengeance, est la
condition nécessaire pour vivre heureux. Accueillons donc la demande de
l’apôtre : « Que le soleil ne se couche pas sur votre colère » (Ep 4, 26).
Ecoutons surtout la parole de Jésus qui a établi la miséricorde comme
idéal de vie, et comme critère de crédibilité de notre foi : « Heureux les
miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde » (Mt 5, 7). C’est la
béatitude qui doit susciter notre engagement tout particulier en cette
Année Sainte.
Comme on peut le remarquer, la miséricorde est, dans l’Ecriture, le
mot-clé pour indiquer l’agir de Dieu envers nous. Son amour n’est pas
seulement affirmé, mais il est rendu visible et tangible. D’ailleurs,
l’amour ne peut jamais être un mot abstrait. Par nature, il est vie
concrète : intentions, attitudes, comportements qui se vérifient dans
l’agir quotidien. La miséricorde de Dieu est sa responsabilité envers
nous. Il se sent responsable, c’est-à-dire qu’il veut notre bien et nous
voir heureux, remplis de joie et de paix. L’amour miséricordieux des
chrétiens doit être sur la même longueur d’onde. Comme le Père aime, ainsi
aiment les enfants. Comme il est miséricordieux, ainsi sommes-nous appelés
à être miséricordieux les uns envers les autres.
10. La miséricorde est le pilier qui soutient la vie de l’Eglise. Dans son
action pastorale, tout devrait être enveloppé de la tendresse par laquelle
on s’adresse aux croyants. Dans son annonce et le témoignage qu’elle donne
face au monde, rien ne peut être privé de miséricorde. La crédibilité de
l’Eglise passe par le chemin de l’amour miséricordieux et de la
compassion. L’Eglise « vit un désir inépuisable d’offrir la
miséricorde ».[8] Peut-être avons-nous parfois oublié de montrer et de
vivre le chemin de la miséricorde. D’une part, la tentation d’exiger
toujours et seulement la justice a fait oublier qu’elle n’est qu’un
premier pas, nécessaire et indispensable, mais l’Eglise doit aller au-delà
pour atteindre un but plus haut et plus significatif. D’autre part, il est
triste de voir combien l’expérience du pardon est toujours plus rare dans
notre culture. Même le mot semble parfois disparaître. Sans le témoignage
du pardon, il n’y a qu’une vie inféconde et stérile, comme si l’on vivait
dans un désert. Le temps est venu pour l’Eglise de retrouver la joyeuse
annonce du pardon. Il est temps de revenir à l’essentiel pour se charger
des faiblesses et des difficultés de nos frères. Le pardon est une force
qui ressuscite en vie nouvelle et donne le courage pour regarder l’avenir
avec espérance.
11. Nous ne pouvons pas oublier le grand enseignement que saint Jean-Paul
II nous a donné dans sa deuxième encyclique Dives in misericordia, qui
arriva à l’époque de façon inattendue et provoqua beaucoup de surprise en
raison du thème abordé. Je voudrais revenir plus particulièrement sur deux
expressions. Tout d’abord le saint Pape remarque l’oubli du thème de la
miséricorde dans la culture actuelle : « La mentalité contemporaine semble
s’opposer au Dieu de miséricorde, et elle tend à éliminer de la vie et à
ôter du cœur humain la notion même de miséricorde. Le mot et l’idée de
miséricorde semblent mettre mal à l’aise l’homme qui, grâce à un
développement scientifique et technique inconnu jusqu’ici, est devenu
maître de la terre qu’il a soumise et dominée (cf. Gn 1, 28). Cette
domination de la terre, entendue parfois de façon unilatérale et
superficielle, ne laisse pas de place, semble-t-il, à la miséricorde… Et
c’est pourquoi, dans la situation actuelle de l’Eglise et du monde, bien
des hommes et bien des milieux, guidés par un sens aigu de la foi,
s’adressent, je dirais quasi spontanément, à la miséricorde de Dieu ».[9]
C’est ainsi que saint Jean-Paul II justifiait l’urgence de l’annonce et du
témoignage à l’égard de la miséricorde dans le monde contemporain : « Il
est dicté par l’amour envers l’homme, envers tout ce qui est humain, et
qui, selon l’intuition d’une grande partie des hommes de ce temps, est
menacé par un péril immense. Le mystère du Christ … m’a poussé à rappeler
dans l’encyclique Redemptor Hominis sa dignité incomparable, m’oblige
aussi à proclamer la miséricorde en tant qu’amour miséricordieux de Dieu
révélé dans ce mystère. Il me conduit également à en appeler à cette
miséricorde et à l’implorer dans cette phase difficile et critique de
l’histoire de l’Eglise et du monde ».[10] Son enseignement demeure plus
que jamais d’actualité et mérite d’être repris en cette Année Sainte.
Recevons ses paroles de façon renouvelée : « L’Eglise vit d’une vie
authentique lorsqu’elle professe et proclame la Miséricorde, attribut le
plus admirable du Créateur et du Rédempteur, et lorsqu’elle conduit les
hommes aux sources de la Miséricorde du Sauveur, dont elle est la
dépositaire et la dispensatrice ».[11]
12. L’Eglise a pour mission d’annoncer la miséricorde de Dieu, cœur
battant de l’Evangile, qu’elle doit faire parvenir au cœur et à l’esprit
de tous. L’Epouse du Christ adopte l’attitude du Fils de Dieu qui va à la
rencontre de tous, sans exclure personne. De nos jours où l’Eglise est
engagée dans la nouvelle évangélisation, le thème de la miséricorde doit
être proposé avec un enthousiasme nouveau et à travers une pastorale
renouvelée. Il est déterminant pour l’Eglise et pour la crédibilité de son
annonce de vivre et de témoigner elle-même de la miséricorde. Son langage
et ses gestes doivent transmettre la miséricorde pour pénétrer le cœur des
personnes et les inciter à retrouver le chemin du retour au Père.
La vérité première de l’Eglise est l’amour du Christ. L’Eglise se fait
servante et médiatrice de cet amour qui va jusqu’au pardon et au don de
soi. En conséquence, là où l’Eglise est présente, la miséricorde du Père
doit être manifeste. Dans nos paroisses, les communautés, les associations
et les mouvements, en bref, là où il y a des chrétiens, quiconque doit
pouvoir trouver une oasis de miséricorde.
13. Nous voulons vivre cette Année Jubilaire à la lumière de la parole du
Seigneur : Miséricordieux comme le Père. L’évangéliste rapporte
l’enseignement du Christ qui dit : « Soyez miséricordieux comme votre Père
est miséricordieux » (Lc 6, 36). C’est un programme de vie aussi exigeant
que riche de joie et de paix. Le commandement de Jésus s’adresse à ceux
qui écoutent sa voix
(cf. Lc 6, 27). Pour être capable de miséricorde, il nous faut donc
d’abord nous mettre à l’écoute de la Parole de Dieu. Cela veut dire qu’il
nous faut retrouver la valeur du silence pour méditer la Parole qui nous
est adressée. C’est ainsi qu’il est possible de contempler la miséricorde
de Dieu et d’en faire notre style de vie.
14. Le pèlerinage est un signe particulier de l’Année Sainte : il est
l’image du chemin que chacun parcourt au long de son existence. La vie est
un pèlerinage, et l’être humain un viator, un pèlerin qui parcourt un
chemin jusqu’au but désiré. Pour passer la Porte Sainte à Rome, et en tous
lieux, chacun devra, selon ses forces, faire un pèlerinage. Ce sera le
signe que la miséricorde est un but à atteindre, qui demande engagement et
sacrifice. Que le pèlerinage stimule notre conversion : en passant la
Porte Sainte, nous nous laisserons embrasser par la miséricorde de Dieu,
et nous nous engagerons à être miséricordieux avec les autres comme le
Père l’est avec nous.
Le Seigneur Jésus nous montre les étapes du pèlerinage à travers lequel
nous pouvons atteindre ce but : « Ne jugez pas, et vous ne serez pas
jugés ; ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés. Pardonnez, et
vous serez pardonnés. Donnez, et l’on vous donnera : c’est une mesure bien
pleine, tassée, secouée, débordante, qui sera versée dans le pan de votre
vêtement ; car la mesure dont vous vous servez pour les autres servira de
mesure aussi pour vous » (Lc 6, 37-38). Il nous est dit, d’abord, de ne
pas juger, et de ne pas condamner. Si l’on ne veut pas être exposé au
jugement de Dieu, personne ne doit devenir juge de son frère. De fait, en
jugeant, les hommes s’arrêtent à ce qui est superficiel, tandis que le
Père regarde les coeurs. Que de mal les paroles ne font-elles pas
lorsqu’elles sont animées par des sentiments de jalousie ou d’envie ! Mal
parler du frère en son absence, c’est le mettre sous un faux jour, c’est
compromettre sa réputation et l’abandonner aux ragots. Ne pas juger et ne
pas condamner signifie, de façon positive, savoir accueillir ce qu’il y a
de bon en toute personne et ne pas permettre qu’elle ait à souffrir de
notre jugement partiel et de notre prétention à tout savoir. Ceci n’est
pas encore suffisant pour exprimer ce qu’est la miséricorde. Jésus demande
aussi de pardonner et de donner, d’être instruments du pardon puisque nous
l’avons déjà reçu de Dieu, d’être généreux à l’égard de tous en sachant
que Dieu étend aussi sa bonté pour nous avec grande magnanimité.
Miséricordieux comme le Père, c’est donc la “devise” de l’Année Sainte.
Dans la miséricorde, nous avons la preuve de la façon dont Dieu aime. Il
se donne tout entier, pour toujours, gratuitement, et sans rien demander
en retour. Il vient à notre secours lorsque nous l’invoquons. Il est beau
que la prière quotidienne de l’Eglise commence avec ces paroles : « Mon
Dieu, viens me délivrer ; Seigneur, viens vite à mon secours » (Ps 69, 2).
L’aide que nous implorons est déjà le premier pas de la miséricorde de
Dieu à notre égard. Il vient nous sauver de la condition de faiblesse dans
laquelle nous vivons. Son aide consiste à rendre accessible sa présence et
sa proximité. Touchés jour après jour par sa compassion, nous pouvons nous
aussi devenir compatissants envers tous.
15. Au cours de cette Année Sainte, nous pourrons faire l’expérience
d’ouvrir le coeur à ceux qui vivent dans les périphéries existentielles
les plus différentes, que le monde moderne a souvent créées de façon
dramatique. Combien de situations de précarité et de souffrance
n’existent-elles pas dans le monde d’aujourd’hui ! Combien de blessures ne
sont-elles pas imprimées dans la chair de ceux qui n’ont plus de voix
parce que leur cri s’est évanoui et s’est tu à cause de l’indifférence des
peuples riches ! Au cours de ce Jubilé, l’Eglise sera encore davantage
appelée à soigner ces blessures, à les soulager avec l’huile de la
consolation, à les panser avec la miséricorde et à les soigner par la
solidarité et l’attention. Ne tombons pas dans l’indifférence qui humilie,
dans l’habitude qui anesthésie l’âme et empêche de découvrir la nouveauté,
dans le cynisme destructeur. Ouvrons nos yeux pour voir les misères du
monde, les blessures de tant de frères et soeurs privés de dignité, et
sentons-nous appelés à entendre leur cri qui appelle à l’aide. Que nos
mains serrent leurs mains et les attirent vers nous afin qu’ils sentent la
chaleur de notre présence, de l’amitié et de la fraternité. Que leur cri
devienne le nôtre et qu’ensemble, nous puissions briser la barrière
d’indifférence qui règne souvent en souveraine pour cacher l’hypocrisie et
l’égoïsme.
J’ai un grand désir que le peuple chrétien réfléchisse durant le Jubilé
sur les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles. Ce sera une
façon de réveiller notre conscience souvent endormie face au drame de la
pauvreté, et de pénétrer toujours davantage le coeur de l’Evangile, où les
pauvres sont les destinataires privilégiés de la miséricorde divine. La
prédication de Jésus nous dresse le tableau de ces oeuvres de miséricorde,
pour que nous puissions comprendre si nous vivons, oui ou non, comme ses
disciples. Redécouvrons les oeuvres de miséricorde corporelles : donner à
manger aux affamés, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui
sont nus, accueillir les étrangers, assister les malades, visiter les
prisonniers, ensevelir les morts. Et n’oublions pas les oeuvres de
miséricorde spirituelles : conseiller ceux qui sont dans le doute,
enseigner les ignorants, avertir les pécheurs, consoler les affligés,
pardonner les offenses, supporter patiemment les personnes ennuyeuses,
prier Dieu pour les vivants et pour les morts.
Nous ne pouvons pas échapper aux paroles du Seigneur et c’est sur elles
que nous serons jugés : aurons-nous donné à manger à qui a faim et à boire
à qui a soif ? Aurons-nous accueilli l’étranger et vêtu celui qui était
nu ? Aurons-nous pris le temps de demeurer auprès de celui qui est malade
et prisonnier ? (cf. Mt 25, 31-45). De même, il nous sera demandé si nous
avons aidé à sortir du doute qui engendre la peur, et bien souvent la
solitude; si nous avons été capable de vaincre l’ignorance dans laquelle
vivent des millions de personnes, surtout des enfants privés de l’aide
nécessaire pour être libérés de la pauvreté, si nous nous sommes faits
proches de celui qui est seul et affligé; si nous avons pardonné à celui
qui nous offense, si nous avons rejeté toute forme de rancoeur et de haine
qui porte à la violence, si nous avons été patients à l’image de Dieu qui
est si patient envers nous; si enfin, nous avons confié au Seigneur, dans
la prière nos frères et soeurs. C’est dans chacun de ces « plus petits »
que le Christ est présent. Sa chair devient de nouveau visible en tant que
corps torturé, blessé, flagellé, affamé, égaré… pour être reconnu par
nous, touché et assisté avec soin. N’oublions pas les paroles de Saint
Jean de la Croix : « Au soir de notre vie, nous serons jugés sur
l’amour ».[12]
16. Dans l’Evangile de Luc, nous trouvons un autre aspect important pour
vivre avec foi ce Jubilé. L’évangéliste raconte qu’un jour de sabbat,
Jésus retourna à Nazareth, et comme il avait l’habitude de le faire, il
entra dans la synagogue. On l’appela pour lire l’Ecriture et la commenter.
C’était le passage du prophète Isaïe où il est écrit : « L’esprit du
Seigneur Dieu est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par
l’onction. Il m’a envoyé annoncer la bonne nouvelle aux humbles, guérir
ceux qui ont le cœur brisé, proclamer aux captifs leur délivrance, aux
prisonniers leur libération, proclamer une année de bienfaits accordée par
le Seigneur » (Is 61, 1-2). « Une année de bienfaits » : c’est ce que le
Seigneur annonce et que nous voulons vivre. Que cette Année Sainte expose
la richesse de la mission de Jésus qui résonne dans les paroles du
Prophète : dire une parole et faire un geste de consolation envers les
pauvres, annoncer la libération de ceux qui sont esclaves dans les
nouvelles prisons de la société moderne, redonner la vue à qui n’est plus
capable de voir car recroquevillé sur lui-même, redonner la dignité à ceux
qui en sont privés. Que la prédication de Jésus soit de nouveau visible
dans les réponses de foi que les chrétiens sont amenés à donner par leur
témoignage. Que les paroles de l’Apôtre nous accompagnent : « celui qui
pratique la miséricorde, qu’il ait le sourire » (Rm 12, 8).
17. Puisse le Carême de cette Année Jubilaire être vécu plus intensément
comme un temps fort pour célébrer et expérimenter la miséricorde de Dieu.
Combien de pages de l’Ecriture peuvent être méditées pendant les semaines
du Carême, pour redécouvrir le visage miséricordieux du Père ! Nous
pouvons nous aussi répéter avec Michée : Toi, Seigneur, tu es un Dieu qui
efface l’iniquité et pardonne le péché. De nouveau, tu nous montreras ta
miséricorde, tu fouleras aux pieds nos crimes, tu jetteras au fond de la
mer tous nos péchés ! (cf. 7, 18-19).
Ces pages du prophète Isaïe pourront être méditées plus concrètement en ce
temps de prière, de jeûne et de charité : « Le jeûne qui me plaît,
n’est-ce pas ceci : faire tomber les chaînes injustes, délier les attaches
du joug, rendre la liberté aux opprimés, briser tous les jougs ? N’est-ce
pas partager ton pain avec celui qui a faim, accueillir chez toi les
pauvres sans abri, couvrir celui que tu verras sans vêtement, ne pas te
dérober à ton semblable ? Alors ta lumière jaillira comme l’aurore, et tes
forces reviendront vite. Devant toi marchera ta justice, et la gloire du
Seigneur fermera la marche. Alors, si tu appelles, le Seigneur répondra ;
si tu cries, il dira : « Me voici. » Si tu fais disparaître de chez toi le
joug, le geste accusateur, la parole malfaisante, si tu donnes à celui qui
a faim ce que toi, tu désires, et si tu combles les désirs du malheureux,
ta lumière se lèvera dans les ténèbres et ton obscurité sera lumière de
midi. Le Seigneur sera toujours ton guide. En plein désert, il comblera
tes désirs et te rendra vigueur. Tu seras comme un jardin bien irrigué,
comme une source où les eaux ne manquent jamais » (Is 58, 6-11).
L’initiative appelée « 24 heures pour le Seigneur » du vendredi et samedi
qui précèdent le IVème dimanche de Carême doit monter en puissance dans
les diocèses. Tant de personnes se sont de nouveau approchées du sacrement
de Réconciliation, et parmi elles de nombreux jeunes, qui retrouvent ainsi
le chemin pour revenir au Seigneur, pour vivre un moment de prière
intense, et redécouvrir le sens de leur vie. Avec conviction, remettons au
centre le sacrement de la Réconciliation, puisqu’il donne à toucher de nos
mains la grandeur de la miséricorde. Pour chaque pénitent, ce sera une
source d’une véritable paix intérieure.
Je ne me lasserai jamais d’insister pour que les confesseurs soient un
véritable signe de la miséricorde du Père. On ne s’improvise pas
confesseur. On le devient en se faisant d’abord pénitent en quête de
pardon. N’oublions jamais qu’être confesseur, c’est participer à la
mission de Jésus d’être signe concret de la continuité d’un amour divin
qui pardonne et qui sauve. Chacun de nous a reçu le don de l’Esprit Saint
pour le pardon des péchés, nous en sommes responsables. Nul d’entre nous
n’est maître du sacrement, mais un serviteur fidèle du pardon de Dieu.
Chaque confesseur doit accueillir les fidèles comme le père de la parabole
du fils prodigue : un père qui court à la rencontre du fils bien qu’il ait
dissipé tous ses biens. Les confesseurs sont appelés à serrer sur eux ce
fils repentant qui revient à la maison, et à exprimer la joie de l’avoir
retrouvé. Ils ne se lasseront pas non plus d’aller vers l’autre fils resté
dehors et incapable de se réjouir, pour lui faire comprendre que son
jugement est sévère et injuste, et n’a pas de sens face à la miséricorde
du Père qui n’a pas de limite. Ils ne poseront pas de questions
impertinentes, mais comme le père de la parabole, ils interrompront le
discours préparé par le fils prodigue, parce qu’ils sauront accueillir
dans le coeur du pénitent l’appel à l’aide et la demande de pardon. En
résumé, les confesseurs sont appelés, toujours, partout et en toutes
situations, à être le signe du primat de la miséricorde.
18. Au cours du carême de cette Année Sainte, j’ai l’intention d’envoyer
les Missionnaires de la Miséricorde. Ils seront le signe de la sollicitude
maternelle de l’Eglise à l’égard du Peuple de Dieu, pour qu’il entre en
profondeur dans la richesse de ce mystère aussi fondamental pour la foi.
Ce seront des prêtres à qui j’aurai donné l’autorité pour pardonner aussi
les péchés qui sont réservés au Siège Apostolique, afin de rendre
explicite l’étendue de leur mandat. Ils seront surtout signe vivant de la
façon dont le Père accueille ceux qui sont à la recherche de son pardon.
Ils seront des missionnaires de la miséricorde car ils se feront auprès de
tous l’instrument d’une rencontre riche en humanité, source de libération,
lourde de responsabilité afin de dépasser les obstacles à la reprise de la
vie nouvelle du Baptême. Dans leur mission, ils se laisseront guider par
la parole de l’Apôtre : « Dieu, en effet, a enfermé tous les hommes dans
le refus de croire pour faire à tous miséricorde » (Rm 11, 32). De fait,
tous, sans exclusion, sont invités à accueillir l’appel à la miséricorde.
Que les missionnaires vivent cet appel en fixant le regard sur Jésus,
« Grand-Prêtre miséricordieux et digne de foi » (He 2, 17).
Je demande à mes frères évêques d’inviter et d’accueillir ces
Missionnaires, pour qu’ils soient avant tout des prédicateurs convaincants
de la miséricorde. Que soient organisées dans les diocèses des « missions
vers le peuple », de sorte que ces Missionnaires soient les hérauts de la
joie du pardon. Qu’ils célèbrent le sacrement de la Réconciliation pour le
peuple, pour que le temps de grâce de l’Année Jubilaire permette à de
nombreux fils éloignés de retrouver le chemin de la maison paternelle. Que
les pasteurs, spécialement pendant le temps fort du Carême, soient invités
à appeler les fidèles à s’approcher « vers le Trône de la grâce, pour
obtenir miséricorde et recevoir la grâce de son secours » (He 4, 16).
19. Que puisse parvenir à tous la parole de pardon et que l’invitation à
faire l’expérience de la miséricorde ne laisse personne indifférent ! Mon
appel à la conversion s’adresse avec plus d’insistance à ceux qui se
trouvent éloignés de la grâce de Dieu en raison de leur conduite de vie.
Je pense en particulier aux hommes et aux femmes qui font partie d’une
organisation criminelle quelle qu’elle soit. Pour votre bien, je vous
demande de changer de vie. Je vous le demande au nom du Fils de Dieu qui,
combattant le péché, n’a jamais rejeté aucun pécheur. Ne tombez pas dans
le terrible piège qui consiste à croire que la vie ne dépend que de
l’argent, et qu’à côté, le reste n’aurait ni valeur, ni dignité. Ce n’est
qu’une illusion. Nous n’emportons pas notre argent dans l’au-delà.
L’argent ne donne pas le vrai bonheur. La violence pour amasser de
l’argent qui fait couler le sang ne rend ni puissant, ni immortel. Tôt ou
tard, le jugement de Dieu viendra, auquel nul ne pourra échapper.
Le même appel s’adresse aux personnes fautives ou complices de corruption.
Cette plaie puante de la société est un péché grave qui crie vers le ciel,
car il mine jusqu’au fondement de la vie personnelle et sociale. La
corruption empêche de regarder l’avenir avec espérance, parce que son
arrogance et son avidité anéantissent les projets des faibles et chassent
les plus pauvres. C’est un mal qui prend racine dans les gestes quotidiens
pour s’étendre jusqu’aux scandales publics. La corruption est un
acharnement dans le péché qui entend substituer à Dieu l’illusion de
l’argent comme forme de pouvoir. C’est une oeuvre des ténèbres, qui
s’appuie sur la suspicion et l’intrigue. Corruptio optimi pessima, disait
avec raison saint Grégoire le Grand, pour montrer que personne n’est
exempt de cette tentation. Pour la vaincre dans la vie individuelle et
sociale, il faut de la prudence, de la vigilance, de la loyauté, de la
transparence, le tout en lien avec le courage de la dénonciation. Si elle
n’est pas combattue ouvertement, tôt ou tard on s’en rend complice et elle
détruit l’existence.
Voici le moment favorable pour changer de vie ! Voici le temps de se
laisser toucher au coeur. Face au mal commis, et même aux crimes graves,
voici le moment d’écouter pleurer les innocents dépouillés de leurs biens,
de leur dignité, de leur affection, de leur vie même. Rester sur le chemin
du mal n’est que source d’illusion et de tristesse. La vraie vie est bien
autre chose. Dieu ne se lasse pas de tendre la main. Il est toujours prêt
à écouter, et moi aussi je le suis, comme mes frères évêques et prêtres.
Il suffit d’accueillir l’appel à la conversion et de se soumettre à la
justice, tandis que l’Eglise offre la miséricorde.
20. Dans ce contexte, il n’est pas inutile de rappeler le rapport entre
justice et miséricorde. Il ne s’agit pas de deux aspects contradictoires,
mais de deux dimensions d’une unique réalité qui se développe
progressivement jusqu’à atteindre son sommet dans la plénitude de l’amour.
La justice est un concept fondamental pour la société civile, quand la
référence normale est l’ordre juridique à travers lequel la loi
s’applique. La justice veut que chacun reçoive ce qui lui est dû. Il est
fait référence de nombreuses fois dans la Bible à la justice divine et à
Dieu comme juge. On entend par là l’observance intégrale de la Loi et le
comportement de tout bon israëlite conformément aux commandements de Dieu.
Cette vision est cependant souvent tombée dans le légalisme, déformant
ainsi le sens originel et obscurcissant le sens profond de la justice.
Pour dépasser cette perspective légaliste, il faut se rappeler que dans
l’Ecriture, la justice est essentiellement conçue comme un abandon
confiant à la volonté de Dieu.
Pour sa part, Jésus s’exprime plus souvent sur l’importance de la foi que
sur l’observance de la loi. C’est en ce sens qu’il nous faut comprendre
ses paroles, lorsqu’à table avec Matthieu et d’autres publicains et
pécheurs, il dit aux pharisiens qui le critiquent : « Allez apprendre ce
que signifie : Je veux la miséricorde, non le sacrifice. En effet, je ne
suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs » (Mt 9, 13). En face
d’une vision de la justice comme simple observance de la loi qui divise
entre justes et pécheurs, Jésus indique le grand don de la miséricorde qui
va à la recherche des pécheurs pour leur offrir le pardon et le salut. On
comprend alors pourquoi Jésus fut rejeté par les pharisiens et les
docteurs de la loi, à cause de sa vision libératrice et source de
renouveau. Pour être fidèles à la loi, ils posaient des poids sur les
épaules des gens, rendant vaine la miséricorde du Père. Le respect de la
loi ne peut faire obstacle aux exigences de la dignité humaine.
L’évocation que fait Jésus du prophète Osée – « Je veux la fidélité, non
le sacrifice » (6, 6) – est très significative. Jésus affirme que la règle
de vie de ses disciples devra désormais intégrer le primat de la
miséricorde, comme Lui-même en a témoigné, partageant son repas avec les
pécheurs. La miséricorde se révèle une nouvelle fois comme une dimension
fondamentale de la mission de Jésus. Elle est un véritable défi face à ses
interlocuteurs qui s’arrêtaient au respect formel de la loi. Jésus au
contraire, va au-delà de la loi; son partage avec ceux que la loi
considérait comme pécheurs fait comprendre jusqu’où va sa miséricorde.
L’apôtre Paul a parcouru un chemin similaire. Avant de rencontrer le
Christ sur le chemin de Damas, il consacrait sa vie à observer de manière
irréprochable la justice de la loi (cf. Ph 3, 6). La conversion au Christ
l’amena à changer complètement de regard, au point qu’il affirme dans la
Lettre aux Galates : « Nous avons cru, nous aussi, au Christ Jésus pour
devenir des justes par la foi au Christ, et non par la pratique de la
Loi » (2, 16). Sa compréhension de la justice change radicalement. Paul
situe désormais en premier la foi, et non plus la loi. Ce n’est pas
l’observance de la loi qui sauve, mais la foi en Jésus-Christ, qui par sa
mort et sa résurrection, nous a donné la miséricorde qui justifie. La
justice de Dieu devient désormais libération pour ceux qui sont esclaves
du péché et de toutes ses conséquences. La justice de Dieu est son pardon
(cf. Ps 50, 11-16).
21. La miséricorde n’est pas contraire à la justice, mais illustre le
comportement de Dieu envers le pécheur, lui offrant une nouvelle
possibilité de se repentir, de se convertir et de croire. Ce qu’a vécu le
prophète Osée nous aide à voir le dépassement de la justice par la
miséricorde. L’époque de ce prophète est parmi les plus dramatiques de
l’histoire du peuple hébreu. Le Royaume est près d’être détruit ; le
peuple n’est pas demeuré fidèle à l’alliance, il s’est éloigné de Dieu et
a perdu la foi des Pères. Suivant une logique humaine, il est juste que
Dieu pense à rejeter le peuple infidèle : il n’a pas été fidèle au pacte,
et il mérite donc la peine prévue, c’est-à-dire l’exil. Les paroles du
prophète l’attestent : « Il ne retournera pas au pays d’Égypte ; Assour
deviendra son roi, car ils ont refusé de revenir à moi » (Os 11, 5).
Cependant, après cette réaction qui se réclame de la justice, le prophète
change radicalement son langage et révèle le vrai visage de Dieu : « Mon
cœur se retourne contre moi ; en même temps, mes entrailles frémissent. Je
n’agirai pas selon l’ardeur de ma colère, je ne détruirai plus Israël, car
moi, je suis Dieu, et non pas homme : au milieu de vous je suis le Dieu
saint, et je ne viens pas pour exterminer » (11, 8-9). Commentant les
paroles du prophète, saint Augustin écrit : « Il est plus facile pour Dieu
de retenir la colère plutôt que la miséricorde ».[13] C’est exactement
ainsi. La colère de Dieu ne dure qu’un instant, et sa miséricorde est
éternelle.
Si Dieu s’arrêtait à la justice, il cesserait d’être Dieu ; il serait
comme tous les hommes qui invoquent le respect de la loi. La justice seule
ne suffit pas et l’expérience montre que faire uniquement appel à elle
risque de l’anéantir. C’est ainsi que Dieu va au-delà de la justice avec
la miséricorde et le pardon. Cela ne signifie pas dévaluer la justice ou
la rendre superflue, au contraire. Qui se trompe devra purger sa peine,
mais ce n’est pas là le dernier mot, mais le début de la conversion, en
faisant l’expérience de la tendresse du pardon. Dieu ne refuse pas la
justice. Il l’intègre et la dépasse dans un événement plus grand dans
lequel on fait l’expérience de l’amour, fondement d’une vraie justice. Il
nous faut prêter grande attention à ce qu’écrit Paul pour ne pas faire la
même erreur que l’Apôtre reproche à ses contemporains juifs : « En ne
reconnaissant pas la justice qui vient de Dieu, et en cherchant à
instaurer leur propre justice, ils ne se sont pas soumis à la justice de
Dieu. Car l’aboutissement de la Loi, c’est le Christ, afin que soit donnée
la justice à toute personne qui croit » (Rm 10, 3-4). Cette justice de
Dieu est la miséricorde accordée à tous comme une grâce venant de la mort
et de la résurrection de Jésus-Christ. La Croix du Christ est donc le
jugement de Dieu sur chacun de nous et sur le monde, puisqu’elle nous
donne la certitude de l’amour et de la vie nouvelle.
22. Le jubilé amène la réflexion sur l’indulgence. Elle revêt une
importance particulière au cours de cette Année Sainte. Le pardon de Dieu
pour nos péchés n’a pas de limite. Dans la mort et la résurrection de
Jésus-Christ, Dieu rend manifeste cet amour qui va jusqu’à détruire le
péché des hommes. Il est possible de se laisser réconcilier avec Dieu à
travers le mystère pascal et la médiation de l’Eglise. Dieu est toujours
prêt au pardon et ne se lasse jamais de l’offrir de façon toujours
nouvelle et inattendue. Nous faisons tous l’expérience du péché. Nous
sommes conscients d’être appelés à la perfection (cf. Mt 5, 48), mais nous
ressentons fortement le poids du péché. Quand nous percevons la puissance
de la grâce qui nous transforme, nous faisons l’expérience de la force du
péché qui nous conditionne. Malgré le pardon, notre vie est marquée par
les contradictions qui sont la conséquence de nos péchés. Dans le
sacrement de la Réconciliation, Dieu pardonne les péchés, et ils sont
réellement effacés, cependant que demeure l’empreinte négative des péchés
dans nos comportements et nos pensées. La miséricorde de Dieu est
cependant plus forte que ceci. Elle devient indulgence du Père qui rejoint
le pécheur pardonné à travers l’Epouse du Christ, et le libère de tout ce
qui reste des conséquences du péché, lui donnant d’agir avec charité, de
grandir dans l’amour plutôt que de retomber dans le péché.
L’Eglise vit la communion des saints. Dans l’eucharistie, cette communion,
qui est don de Dieu, est rendue présente comme une union spirituelle qui
lie les croyants avec les Saints et les Bienheureux dont le nombre est
incalculable (cf. Ap 7,4). Leur sainteté vient au secours de notre
fragilité, et la Mère Eglise est ainsi capable, par sa prière et sa vie,
d’aller à la rencontre de la faiblesse des uns avec la sainteté des
autres. Vivre l’indulgence de l’Année Sainte, c’est s’approcher de la
miséricorde du Père, avec la certitude que son pardon s’étend à toute la
vie des croyants. L’indulgence, c’est l’expérience de la sainteté de
l’Eglise qui donne à tous de prendre part au bénéfice de la rédemption du
Christ, en faisant en sorte que le pardon parvienne jusqu’aux extrêmes
conséquences que rejoint l’amour de Dieu. Vivons intensément le Jubilé, en
demandant au Père le pardon des péchés et l’étendue de son indulgence
miséricordieuse.
23. La valeur de la miséricorde dépasse les frontières de l’Eglise. Elle
est le lien avec le Judaïsme et l’Islam qui la considèrent comme un des
attributs les plus significatifs de Dieu. Israël a d’abord reçu cette
révélation qui demeure dans l’histoire comme le point de départ d’une
richesse incommensurable à offrir à toute l’humanité. Nous l’avons vu, les
pages de l’Ancien Testament sont imprégnées de miséricorde, puisqu’elles
racontent les oeuvres accomplies par le Seigneur en faveur de son peuple
dans les moments les plus difficiles de son histoire. L’Islam de son côté,
attribue au Créateur les qualificatifs de Miséricordieux et Clément. On
retrouve souvent ces invocations sur les lèvres des musulmans qui se
sentent accompagnés et soutenus par la miséricorde dans leur faiblesse
quotidienne. Eux aussi croient que nul ne peut limiter la miséricorde
divine car ses portes sont toujours ouvertes.
Que cette Année Jubilaire, vécue dans la miséricorde, favorise la
rencontre avec ces religions et les autres nobles traditions religieuses.
Qu’elle nous rende plus ouverts au dialogue pour mieux nous connaître et
nous comprendre. Qu’elle chasse toute forme de fermeture et de mépris.
Qu’elle repousse toute forme de violence et de discrimination.
24. Que notre pensée se tourne vers la Mère de la Miséricorde. Que la
douceur de son regard nous accompagne en cette Année Sainte, afin que tous
puissent redécouvrir la joie de la tendresse de Dieu. Personne n’a connu
comme Marie la profondeur du mystère de Dieu fait homme. Sa vie entière
fut modelée par la présence de la miséricorde faite chair. La Mère du
Crucifié Ressuscité est entrée dans le sanctuaire de la miséricorde divine
en participant intimement au mystère de son amour.
Choisie pour être la Mère du Fils de Dieu, Marie fut préparée depuis
toujours par l’amour du Père pour être l’Arche de l’Alliance entre Dieu et
les hommes. Elle a gardé dans son coeur la divine miséricorde en parfaite
syntonie avec son Fils Jésus. Son chant de louange, au seuil de la maison
d’Elisabeth, fut consacré à la miséricorde qui s’étend « d’âge en âge »
(Lc 1, 50). Nous étions nous aussi présents dans ces paroles prophétiques
de la Vierge Marie, et ce sera pour nous un réconfort et un soutien
lorsque nous franchirons la Porte Sainte pour goûter les fruits de la
miséricorde divine.
Près de la croix, Marie avec Jean, le disciple de l’amour, est témoin des
paroles de pardon qui jaillissent des lèvres de Jésus. Le pardon suprême
offert à qui l’a crucifié nous montre jusqu’où peut aller la miséricorde
de Dieu. Marie atteste que la miséricorde du Fils de Dieu n’a pas de
limite et rejoint tout un chacun sans exclure personne. Adressons lui
l’antique et toujours nouvelle prière du Salve Regina, puisqu’elle ne se
lasse jamais de poser sur nous un regard miséricordieux, et nous rend
dignes de contempler le visage de la miséricorde, son Fils Jésus.
Que notre prière s’étende aussi à tant de Saints et de Bienheureux qui ont
fait de la miséricorde la mission de leur vie. Cette pensée s’adresse en
particulier à la grande apôtre de la miséricorde, Sainte Faustine
Kowalska. Elle qui fut appelée à entrer dans les profondeurs de la
miséricorde divine, qu’elle intercède pour nous et nous obtienne de vivre
et de cheminer toujours dans le pardon de Dieu et dans l’inébranlable
confiance en son amour.
25. Une Année Sainte extraordinaire pour vivre dans la vie de chaque jour
la miséricorde que le Père répand sur nous depuis toujours. Au cours de ce
Jubilé, laissons-nous surprendre par Dieu. Il ne se lasse jamais d’ouvrir
la porte de son coeur pour répéter qu’il nous aime et qu’il veut partager
sa vie avec nous. L’Eglise ressent fortement l’urgence d’annoncer la
miséricorde de Dieu. La vie de l’Eglise est authentique et crédible
lorsque la miséricorde est l’objet d’une annonce convaincante. Elle sait
que sa mission première, surtout à notre époque toute remplie de grandes
espérances et de fortes contradictions, est de faire entrer tout un chacun
dans le grand mystère de la miséricorde de Dieu, en contemplant le visage
du Christ. L’Eglise est d’abord appelée à être témoin véridique de la
miséricorde, en la professant et en la vivant comme le centre de la
Révélation de Jésus-Christ. Du cœur de la Trinité, du plus profond du
mystère de Dieu, jaillit et coule sans cesse le grand fleuve de la
miséricorde. Cette source ne sera jamais épuisée pour tous ceux qui s’en
approcheront. Chaque fois qu’on en aura besoin, on pourra y accéder, parce
que la miséricorde de Dieu est sans fin. Autant la profondeur du mystère
renfermé est insondable, autant la richesse qui en découle est
inépuisable.
Qu’en cette Année Jubilaire l’Eglise fasse écho à la Parole de Dieu qui
résonne, forte et convaincante, comme une parole et un geste de pardon, de
soutien, d’aide, d’amour. Qu’elle ne se lasse jamais d’offrir la
miséricorde et soit toujours patiente pour encourager et pardonner. Que
l’Eglise se fasse la voix de tout homme et de toute femme, et répète avec
confiance et sans relâche : « Rappelle-toi, Seigneur, ta tendresse, ton
amour qui est de toujours » (Ps 25, 6).
Donné à Rome, près de Saint Pierre, le 11 avril Veille du IIème Dimanche
de Pâques ou de la Divine Miséricorde, de l’An du Seigneur 2015, le
troisième de mon pontificat.
Franciscus
Tél service privilège
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